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La dissertation de philosophie en terminale : épreuve de réflexion, modèle à réfléchir
Par Jean-Jacques ROSAT - Allocution d’ouverture au Colloque de l’ACIREPh (extrait) Octobre 2000
jeudi 21 décembre 2000, par
Le Colloque d’aujourd’hui se situe dans le droit fil de celui que nous avons tenu l’an passé. Les convictions qui nous animent et qui ont présidé à la création de notre association au printemps 98 n’ont pas changé. Enseigner la philosophie n’est pas seulement une affaire de compétences théoriques : c’est un métier. Les évolutions de la société, de l’école, celles de la philosophie aussi, font que ce métier a changé. Or, pour des raisons multiples, la réflexion pédagogique et didactique en philosophie s’est trouvé bloquée depuis des décennies. Nous rencontrons donc dans notre métier des difficultés qui nous laissent souvent démunis parce que nous manquons d’outils pour les analyser et d’une circulation des idées et des expériences qui favoriserait l’imagination. Les élèves en pâtissent : c’est leur droit à une véritable formation philosophique élémentaire qui est en jeu. Nous ne surmonterons ces difficultés que par une élaboration collective. Celle-ci doit permettre aux professeurs de philosophie de se rendre les auteurs (les co-auteurs) de leur propre formation continue. Elle doit être menée de manière libre et pluraliste : sans doctrine officielle ni officieuse et sans tabou. Pour être efficace, elle doit partir du terrain, des pratiques. C’est en menant ensemble un tel travail que nous auront le plus de chance de parvenir à décrisper le débat entre les professeurs de philosophie et à construire entre nous un minimum de sens commun.
Ce Colloque, cependant, sera sensiblement différent de celui de l’année dernière puisque nous avons choisi cette fois de concentrer notre attention sur un objet déterminé : la Dissertation, qui est, si je puis dire, notre pain quotidien. Cela nous a conduit à mettre particulièrement l’accent sur l’analyse de nos propres pratiques. Bien sûr, comme l’an passé, nous écouterons des chercheurs et des collègues venus exposer le fruit de leurs travaux et nous faire profiter de leurs compétences. Mais nous avons voulu privilégier la participation active et l’intervention de chacun d’entre vous. S’agissant de la dissertation, personne ici ne sait mieux qu’un autre ce qu’elle est ou ce qu’elle n’est pas. Chacun a son expérience, ses manières de faire, ses propres idées. Ce sont ces expériences, ces manières de faire et ces idées que nous voulons mettre en commun, et dont nous voulons faire le matériau d’une réflexion commune. Avec une question en tête : la dissertation de philosophie en terminale, mais qu’est-ce que c’est ?
La dissertation, omniprésente et indéterminée
Le paradoxe de la dissertation de philo, en effet, c’est qu’elle est à la fois omniprésente et indéterminée. Et même : d’autant plus indéterminée qu’elle est omniprésente.
Elle est omniprésente : elle n’est pas seulement l’exercice que nous enseignons à nos élèves, sur lesquels nous les évaluons et pour lequel nous les préparons au bac ; elle n’est pas seulement ce à quoi nous passons, en correction de copies, un bon 1/3 et peut-être plus de notre temps de travail ; elle est ce par quoi nous avons été formés nous-mêmes, ce par quoi nous nous sommes qualifiés comme enseignants de philo (examens et concours de philo sont des dissertations) ; et, au fond, pour la plupart d’entre nous, elle est vraisemblablement le seul genre d’écriture philosophique que nous ayons jamais pratiqué. La dissertation de philo est pour nous tous beaucoup plus qu’un exercice : nous sommes intellectuellement façonnés par la dissertation ; elle est constitutive de nos propres cadres de pensée. Elle est devenue, en quelque sorte, une “seconde nature”.
La conséquence de cette omniprésence, c’est que la dissertation va tellement de soi pour nous que nous avons beaucoup de mal à prendre du recul par rapport à elle et à en faire un objet de réflexion.
Nous avons beaucoup de mal à dire ce qu’elle est et ce qu’elle n’est pas, à la définir. Nous avons des mots bien sûr, par exemple « problématique » ou « problématiser ». Mais la propension que nous avons à les employer à tout bout de champ n’est pas très rassurante : il n’est pas certain ni que nous mettions tous la même chose sous ce mot, ni que les élèves quand ils nous entendent parviennent à lui donner un véritable sens ; et ce n’est pas récuser l’exigence de problématisation que se demander si de telles expressions ne finissent pas par devenir dans notre enseignement des mots fétiches et des mots-écrans.
Nous avons beaucoup de mal à nous mettre d’accord sur les exigences qu’elle recouvre. Deux indices de cela : 1) nos désaccords au moment des commissions d’entente et d’harmonisation à l’occasion de la correction du bac, désaccords trop criants et trop répétés pour que je m’y étende ; 2) la cacophonie des conseils donnés dans les multiples guides méthodologiques que lisent et utilisent nos élèves, guides qui, il faut le rappeler, ne sont pas uniquement rédigés par des marchands de soupe peu scrupuleux et hâtifs, mais aussi par des collègues chevronnés qui, de toute évidence, cherchent sérieusement à aider les élèves de toute leur expérience et de tout leur savoir-faire.
Nous avons beaucoup de mal à voir la dissertation comme un genre d’exercice et d’écriture philosophique qui a évidemment ses mérites et ses vertus (ce n’est pas sans raisons qu’elle s’est imposée dans l’enseignement philosophique français depuis près de 150 ans, et même, pas sans un certain nombre de bonnes raisons) mais un genre qui a aussi ses limites, ses risques et ses effets pervers.
Nous avons beaucoup de mal à concevoir que dans d’autres pays on puisse enseigner la philosophie au moyen d’autres exercices ou imaginer dans notre enseignement d’autres types de travaux écrits.
Nous avons beaucoup de mal à préciser ce qu’on peut attendre d’une dissertation à chaque niveau d’enseignement. En effet, nous désignons sous ce même terme ce qui s’écrit dans les classes techniques aussi bien qu’à l’agrégation. On peut bien entendu tout à fait défendre l’idée qu’il existe des caractéristiques et des visées communes pour tout exercice appelé “dissertation” à tous les niveaux de l’enseignement de la philosophie ; mais à condition de reconnaître en même temps que les exigences ne peuvent pas être les mêmes, et du même coup de se mettre en devoir de spécifier et d’expliciter pour chaque niveau d’enseignement ce qui est exigible et ce qui ne l’est pas.
Enfin et surtout, nous avons beaucoup de mal à en expliciter les exigences pour ceux à qui nous sommes chargés de la transmettre : une grande partie des difficultés que nous avons à enseigner la dissertation à nos élèves tient sans doute à la part d’implicite qui demeure dans notre enseignement ; et plus les élèves qui sont en face de nous ont un rapport au langage et à la culture qui est éloigné de ceux qui correspondent au modèle dissertatif, plus cette part d’implicite est pour eux un obstacle à l’apprentissage de la dissertation. Est-ce forcer le trait que dire que, dans la plupart des cas, nous ne réussissons à l’enseigner, sans trop savoir comment, qu’à ceux qui étaient déjà en connivence avec elle ? Quant aux autres, nous nous bornons souvent à enregistrer leur échec, c’est-à-dire, à constater notre impuissance, à moins que, comme cela arrive heureusement parfois un “déclic” ne se produise, auquel cas, nous ne savons pratiquement jamais dire ce qui a bien pu le favoriser.
Rendre la dissertation moins indéterminée et son enseignement moins implicite, c’est pour nous un objectif prioritaire si nous voulons que notre enseignement soit un peu plus démocratique.
Le travail de notre colloque va se dérouler selon trois axes
Prendre de la distance
Notre premier axe de travail consistera à essayer de prendre de la distance, décentrer notre regard en examinant la dissertation sous des angles différents de ceux auxquels nous sommes habitués.
a) Prendre de la distance, c’est prendre un peu de recul historique : comment la dissertation s’inscrit-elle dans la durée et dans l’histoire de notre discipline ? Comment a-t-elle été inventée ? Comment a-t-elle évolué ? Sous quels concepts a-t-elle été définie et pensée ? Quelle permanence et quels changements peut-on enregistrer dans les débats auxquels elle n’a cessé de donner lieu ? Sur ces questions nous pouvons bénéficier, chose rare et précieuse, d’un historien de notre discipline. (Cf. le texte de Bruno Poucet.)
b) Prendre de la distance, c’est nous informer de ce qui se passe ailleurs qu’en philosophie et ailleurs qu’en terminale.
– Cela veut dire, d’une part, élargir notre horizon aux autres disciplines : qu’est-ce que nos élèves entendent appeler dissertation par nos collègues de français, d’histoire, de SES ? Et comment dans ces disciplines la dissertation a-t-elle évolué et quels enseignements pouvons-nous tirer de ces évolutions ? Il commence à se dire que la philosophie est désormais la seule discipline où on enseigne la dissertation. Est-ce vrai ? Quelles conséquences devons-nous en tirer ?
– Cela veut dire, d’autre part, élargir notre horizon à ce qui se passe en philosophie dans l’enseignement supérieur : dans quelle mesure les difficultés que rencontrent nos collègues qui enseignent en DEUG sont-elles différentes des nôtres ? Ou sont-elles du même type ? Plus généralement, qu’en est-il de la formation à la dissertation à l’université et dans la préparation du CAPES et de l’Agrégation ? Fait-elle l’objet d’un enseignement effectif ou bien l’étudiant n’est-il pas toujours supposé l’avoir apprise, on ne sait pas bien où, mais en tout cas “ailleurs” ? (Ce qui, soit dit en passant, pose évidemment toute la question de la formation à la dissertation des futurs professeurs qui seront à leur tour chargés d’enseigner ce qu’on ne leur a jamais explicitement appris. Au bout du compte d’où tirons-nous, nous-mêmes, ce que nous croyons savoir et devoir transmettre en matière de dissertation ? Si la formation à la dissertation des futurs enseignants est laissée au hasard et se fait dans l’implicite, on ne s’étonnera guère que l’exercice reste, comme je viens de le souligner, aussi indéterminé.)
c) Prendre de la distance, c’est enfin essayer, avec l’aide d’un sociologue de l’éducation, de regarder les choses du point de vue des élèves : la dissertation réelle qu’ils écrivent ne saurait être définie seulement par l’ensemble des normes que nous leur assignons ; elle est aussi le résultat des stratégies qu’ils mettent en œuvre pour s’approprier, transformer et “s’arranger avec” nos normes et nos conseils. Eux aussi, à leur manière, contribuent à définir ce qu’est une dissertation de philo : qu’est-ce qu’ils en font ? (Cf. le texte de Patrick Rayou).
Engager une analyse de nos pratiques
Notre deuxième axe de travail va nous conduire à nous engager dans une analyse de nos pratiques.
Le problème en effet n’est pas tant de savoir ce que nous disons de manière générale de la dissertation ni ce que nous croyons qu’elle est ou qu’elle doit être ; mais plutôt de savoir ce qui se fait effectivement (ce que nous faisons effectivement) sous ce nom dans nos classes.
Cela implique de prêter attention à mille petites choses que nous laissons habituellement dans le flou ou le non-dit, mais qui sont vraisemblablement décisives : avec quels mots présentons-nous la dissertation à nos élèves ? quelles sont les premières consignes que nous leur donnons ? Quelle stratégie est la nôtre : (leur donner un sujet et les laisser se débrouiller, ou bien multiplier les recommandations, ou bien faire une dissertation en classe avec eux et dans ce cas, de quelle manière, etc.) ? Ou encore, comment corrigeons-nous ? quel genre de mots ou d’expressions écrivons-nous sur les copies ? leur donnons-nous des grilles d’évaluations et, si oui, lesquelles ?
Nous avons en effet, la plupart du temps, les plus grandes difficultés à évaluer sérieusement notre propre travail et ses effets en termes de formation. Nous disons bien globalement de tel élève ou de telle classe qu’ils ont progressé ou au contraire que leurs difficultés persistent. Mais à quelles marques, à quels signes identifions-nous ces évolutions ou ces blocages ? A quoi reconnaissons-nous que les élèves ont développé telle capacité ? Comment repérons-nous que c’est la maîtrise de telle opération qui leur manque et entrave leur progression ? Plus généralement, quelles représentations avons-nous de ce qui fait obstacle à leur progression ? Par exemple, n’est-ce pas une solution de facilité que d’incriminer à tout bout de champ les fameuses “difficultés d’expression” des élèves (leur mauvais français, la pauvreté et l’incorrection de leur langue) ? Le rapport qu’ils entretiennent au langage, et particulièrement à la langue scolaire, n’est-il pas beaucoup une affaire beaucoup complexe où entrent en jeu leur identité, leurs rapports à la culture, à la société … et à l’enseignant ?
L’analyse minutieuse de nos pratiques est un travail auquel nous ne sommes absolument pas habitués et auquel rien dans notre formation ni notre culture de prof de philo ne nous a préparés, bien au contraire. Il est un peu déconcertant de s’y engager et ce n’est facile pour personne. Pourtant, il nous semble indispensable, si nous voulons quitter le royaume des représentations et de l’idéologie de la dissertation et essayer de savoir ce que, nous et nos élèves, nous faisons réellement.
Pour un cahier des charges de la dissertation
Notre troisième et dernier axe de travail, c’est d’avancer vers un cahier des charges de la dissertation de philo en terminale.
Il nous paraît en effet nécessaire aussi bien pour l’apprentissage que pour l’équité à l’examen, de clarifier le contrat avec les élèves. Mais cela passe par une clarification entre nous.
Dans l’état actuel de non-échange et de non-débat sur nos pratiques effectives, nous ne savons pas, entre nous sur quoi sur sommes d’accord, ni sur quoi nous sommes en désaccord. Rien ne nous autorise à postuler que, par le pouvoir mystérieux de notre attachement commun à la philosophie et de notre formation de philosophes, nous convergerions tous vers une entente profonde au-delà de divergences de surface ; mais nous n’avons pas de raison non plus de croire que nos divergences sont irréductibles et qu’un certain nombre d’entre elles n’apparaîtront pas factices dès que nous accepterons de parler réellement de ce qui se passe sur le terrain. Nous avons des désaccords pédagogiques, sans doute ; mais lesquels ? Comment et jusqu’où s’enracinent-ils dans nos propres expériences, dans les situations d’enseignement différentes où nous nous sommes trouvés au fil des ans, dans nos propres styles de travail, dans nos propres options ou engagements philosophiques ou politiques ? Et ces désaccords, s’ils sont nommés et reconnus, ne peuvent-ils pas constituer la base d’un travail collectif de notre profession sur elle-même pour construire ensemble un cadre suffisamment commun et cohérent à notre enseignement pour que celui-ci devienne à la fois plus crédible et plus formateur ?
Chacun sait que ces désaccords entre nous apparaissent de la manière la plus vive à l’occasion du baccalauréat dans les commissions d’entente et d’harmonisation. L’épreuve de dissertation au bac pilote, comme on dit, de manière si déterminante notre pratique de la dissertation, qu’elle est évidemment un objet privilégié parmi ceux dont nous débattons ici. Je me contenterai d’indiquer quelques pistes de réflexion sur la notation au bac.
Les problèmes de la notation au bac
On dispose depuis l’année dernière d’un rapport sur l’épreuve de philosophie au baccalauréat, et notamment sur sa notation, rapport établi par la doyenne de l’Inspection générale de philosophie, Mme Ménasseyre. Très rapidement résumé, son constat est le suivant : dans le groupe des matières à notation basse (en gros, les matières dites littéraires, par opposition aux matières scientifiques où les moyennes sont plus élevées), la philosophie est, dans toutes les séries la discipline où les moyennes sont en permanence les plus faibles. L’écart avec l’histoire ou l’économie par exemple est de l’ordre d’un point (un point de moins, bien sûr). Et dans les séries technologiques industrielles, l’écart avec les autres matières d’enseignement général est souvent nettement plus grand. En conclusion, le rapport s’attache à montrer que la notation en philo ne manifeste pas les écarts gigantesques dont certains avaient fait état dans le passé ; il conclut qu’il y a sans doute matière à réflexion, mais pas véritablement de quoi s’alarmer.
On a néanmoins le droit — et sans doute le devoir — de s’inquiéter sur deux points.
– D’une part, la faiblesse persistante des notes dans toutes les séries est tout de même le symptôme d’un échec, ou tout au moins le révélateur de difficultés graves que nous rencontrons dans la formation de nos élèves. Si un paquet de copies est à 8 de moyenne, cela signifie que les 2/3 ou les 3/4 d’entre elles d’entre elles ne méritent pas, à nos yeux, la moyenne ; autrement dit, qu’une grande majorité des élèves n’ont pas assimilé ce que nous nous sommes proposés de leur apprendre. Évidemment, on peut toujours trouver des méthodes pour relever les moyennes ; mais modifier la graduation du thermomètre n’a jamais réchauffé l’air ambiant. Le problème des notes au baccalauréat n’est pas, comme certains feignent de le croire, un problème de docimologie ; c’est un problème d’apprentissage et de formation. De quel pourcentage de copies pouvons-nous dire qu’elles sont des dissertations ou qu’elles font de la philosophie ? Ou qu’elles montrent que l’élève s’est formé à quelque chose durant une année de philo ? Derrière le problème de l’évaluation des copies de bac, il y a tout simplement celui de l’évaluation collective de notre enseignement : si les copies de bac nous renvoient une image de ce que les élèves savent et savent faire au bout d’une année, quel jugement sommes-nous amenés à porter sur notre propre enseignement ? Quelle est sa valeur formatrice ? Au bout du compte, quelle note mettons-nous à l’enseignement de philo ?
– D’autre part, une étude présentée l’année dernière au Colloque de l’ACIREPH par Elisabeth Chatel confirme le sentiment de malaise et d’insécurité que beaucoup de profs, mais aussi d’élèves ont à l’égard des notes du bac en philo : il semble que ce soit dans notre discipline que l’écart entre les notes obtenues par l’élève en cours d’année et celle qu’il décroche au bac soit le plus élevé ; C’est la note de philo qui serait la moins fiable. (Cf. sur ce point l’article d’Elisabeth Chatel dans les Actes du premier colloque de l’ACIREPH : « Enseigner la philosophie aujourd’hui : pratiques et devenirs »). On peut penser que c’est là encore, entre autres, un effet de l’indétermination qui entoure la dissertation de philosophie.
Pour un rapport annuel sur l’épreuve de baccalauréat
Nous demandons que soit publié chaque année un rapport de correction du baccalauréat. Un des objectifs de ces rapports serait de permettre l’émergence parmi les professeurs de philosophie d’un consensus sur une question que nous sommes amenés à nous poser chaque année : qu’est-ce qu’un bon sujet ?
Il arrive trop souvent que dans les commissions d’harmonisation nombre de collègues estiment tel sujet complètement inadapté ou très mal formulé et se demandent en toute bonne foi comment d’autres collègues ont bien pu le proposer. Dans bien des cas, il ne s’agit pas seulement de simples mouvements d’humeur à la première lecture : la correction des copies confirme, ou révèle, que tel sujet ne permet absolument pas un échelonnement normal de la notation, qu’il pousse par exemple trop de candidats au contresens ou au bavardage. Les collègues voudraient alors que cette “expérience” instruise, que les sujets de ce genre disparaissent. Il faudrait pour cela que les commissions de choix de sujet, pour l’année suivante, soit informées. Mais comme aucune communication n’existe entre le travail des commissions de choix de sujet et celui des commissions d’entente, on ne peut enregistrer aucun progrès dans la détermination de ce qu’est un bon sujet ni dans l’élimination des mauvais sujets.
Nous sommes convaincus de la nécessité d’établir désormais chaque année un Rapport de correction du baccalauréat. Il serait nourri des observations et réflexions des commissions d’entente et d’harmonisation. Celles-ci prendraient davantage de sens et d’importance et les professeurs s’y impliqueraient davantage, puisque les résultats de leur travail pourraient être recueillis et avoir des retombées. Ce document éclairerait bien entendu le travail des commissions de choix de sujet. Par ailleurs, il constituerait dans l’année une référence pour le professeur chargé de former ses élèves à la dissertation et de les préparer aux épreuves de l’examen. Et ce serait aussi un repère pour l’élève qui aurait plus de chance de comprendre ce qu’on attend de lui et sur quels critères son travail sera jugé. Enfin, on peut espérer que d’année en année, ce rapport favoriserait l’émergence de lignes d’accord explicites entre les professeurs sur leurs exigences et leur évaluation, et qu’il contribuerait à la constitution d’une culture pédagogique commune, non de manière autoritaire, mais à partir de l’expérience et de la réflexion de tous.