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Journées d’étude des 10 et 11 novembre 2022 - À quoi servira la philosophie dans un monde à + 4 degrés ?

mardi 6 septembre 2022, par Acireph

JEUDI 10/11 : Lycée Claude Monet – 1 rue du Docteur Magnan – Paris 13ème Métro : Tolbiac ou Olympiades

VENDREDI 11/11 : Lycée Lurçat
– 48 avenue des Gobelins – Paris 13ème Métro : Place d’Italie ou Gobelins
Jeudi 10 et vendredi 11 novembre 2022

LES INSCRIPTIONS SONT CLOSES

Présentation des journées d’étude :
La question climatique est probablement l’enjeu le plus important auquel devra faire face l’humanité dans les décennies et siècles à venir. Régulièrement les rapports du GIEC, de plus en plus alarmistes, font état des avancées de la recherche scientifique et des projections quant aux évolutions du climat, dont le réchauffement est dorénavant avéré et commencé. La notion d’anthropocène, assez largement popularisée, fait l’objet de critiques tant scientifiques que philosophiques.

Pendant des décennies, la seule vision de l’écologie qui transparaissait dans l’espace public se cantonnait à un discours moralisateur, fondé sur la responsabilité individuelle et les « petits gestes ». Pourtant, l’écologie politique s’est constituée progressivement en champ de recherche depuis les années 1970 et a permis d’élever la réflexion à un niveau systémique, identifiant la place causale de mécanismes économiques dans la combustion d’énergies fossiles, dans l’épuisement des ressources, et venant interroger le sens même du concept de « nature » dans son opposition traditionnelle à la culture et à l’humanité.

L’enjeu climatique interroge le sens que nous donnons à notre enseignement et à notre métier. La plupart des problèmes sur lesquels portent nos cours, sur ce que peuvent être une vie heureuse, une société juste, ou la liberté humaine, ne se poseront plus du tout dans les mêmes termes si les prévisions les plus pessimistes du GIEC se réalisent.

L’apparition de la notion de « nature » dans les programmes des Terminales générales et technologiques pourrait nous donner l’occasion d’aborder les questions que soulève le réchauffement climatique, au croisement de l’écologie et de la politique. Le programme de Terminale de la spécialité « Humanité, littérature et philosophie » indique explicitement : « La question écologique n’est plus seulement celle de la préservation des espèces, mais elle laisse entrevoir le spectre d’un monde inhabitable. »

Dans nos classes, nous avons le souci d’articuler nos cours avec les enjeux du monde contemporain pour proposer à nos élèves, non pas une philosophie atemporelle, mais des outils d’analyse critique pour « diagnostiquer le présent ».

Une telle approche est-elle souhaitable ?

La première raison pour laquelle il semble difficile d’aborder les problèmes environnementaux en classe de philosophie est à peu près inverse à celle pour laquelle les autres problèmes (en philosophie morale et politique par exemple) peuvent sembler difficiles à aborder. Ces derniers sont en effet difficiles parce qu’il n’est pas facile de savoir ce qui est juste. En ce qui concerne les problèmes environnementaux, la difficulté vient plutôt du fait que ce qui est juste semble tellement évident qu’on ne voit pas ce qu’un philosophe pourrait en dire qui soit particulièrement original.

Une deuxième raison tient à la formation. Rares sont, en France, les professeurs formés à la philosophie ou à l’éthique de l’environnement car ces disciplines ne se sont développées que récemment et quasi exclusivement dans le monde anglo-saxon. Savons-nous seulement ce qui s’y fait ?

La troisième raison tient au refus d’aborder les grandes questions du monde contemporain dans l’enseignement français de la philosophie - ce contre quoi l’ACIREPh a affirmé qu’il fallait enseigner la philosophie « vivante ». 

Il en résulte que la plupart d’entre nous sommes incapables d’indiquer les auteurs importants ou les grands courants en écologie politique ; nous ne connaissons pas les arguments fondateurs et les outils conceptuels de cette tradition, d’où notre incapacité à en apprécier la valeur pour la formation des élèves. De même, quand les questions environnementales sont abordées c’est plutôt dans une perspective d’éducation morale et civique où l’aspect philosophique n’est ni premier ni indispensable. N’importe quel enseignant, pour peu qu’il s’y soit intéressé, peut faire réfléchir les élèves aux enjeux des questions environnementales, leur faire faire des enquêtes, des débats, écrire des essais, etc., aussi bien et parfois mieux qu’un professeur de philosophie ; c’est que ces questions et ces pratiques ne sont pas en elles-mêmes philosophiques.

La question revient donc : qu’est-ce que la philosophie peut apporter par rapport aux problèmes environnementaux que les élèves ne pourront trouver dans un autre cours ? La philosophie a-t-elle des connaissances ou des questionnements spécifiques à apporter aux élèves pour les aider à penser les enjeux écologiques ? Sommes-nous suffisamment formés aux recherches contemporaines pour permettre à nos élèves de se les approprier ? Est-ce notre rôle ? Le risque existe que la salle de classe se transforme en tribune politique, et qu’à l’analyse critique se substitue une sorte de catéchisme visant à inculquer nos propres convictions à nos élèves. Quels outils pédagogiques nous permettraient d’éviter ces écueils ? L’éducation à l’esprit critique et l’éveil des consciences citoyennes sont-ils des objectifs incompatibles ?

Si le problème écologique était simple, la philosophie et le cours de philosophie n’auraient guère de rôle à jouer, et le cours sur la « nature » ou sur « les limites de l’humain » (HLP) se réduirait à un discours édifiant à destination des futurs citoyens. Mais ce n’est pas le cas. Car le réchauffement climatique fait l’objet de réflexions intenses et très diversifiées, très conflictuelles, aussi. Loin de proposer des solutions univoques à des problèmes posés dans les mêmes termes, la philosophie et les sciences humaines ont exploré de nombreuses pistes qui méritent d’être connues et prises au sérieux. Pourtant, peu de professeurs sont familiers de ces multiples champs de réflexion.

Quelques exemples : l’éthique environnementale se demande si nous devons protéger la nature sauvage, ou seulement utiliser ses ressources de manière durable. Elle se demande encore si nous devons étendre la sphère de la considération morale à des êtres vivants non sensibles, voire à des écosystèmes. La justice climatique et la justice intergénérationnelle s’intéressent à la répartition des efforts présents et futurs pour lutter contre le réchauffement : faut-il demander de contribuer aux responsables du réchauffement, ou à ses bénéficiaires ? Faut-il accorder une certaine priorité à la génération présente, ou les générations futures ont-elles exactement la même importance morale ?
Sur toutes ces questions, les débats sont vivants, et un cours de philosophie qui se veut autre chose qu’une simple exposition des doctrines classiques gagnerait beaucoup à les présenter.

C’est à une réflexion collective sur ces questions que l’ACIREPh invite les collègues de philosophie à l’occasion de ses journées d’étude des 10 et 11 novembre 2022. Depuis sa création, l’ACIREPh promeut un enseignement de la philosophie vivante et articulé aux savoirs contemporains (6ème et 8ème chantiers de notre Manifeste). Ces journées nous permettront d’articuler ces objectifs avec les questions environnementales dont l’actualité est brûlante.

PROGRAMME DES JOURNÉES D’ÉTUDE

JEUDI 10 NOVEMBRE 2022

9H – Accueil des participants

9H30 – Allocution d’ouverture. Présentation des journées

10h – 12H – Conférence-débat : Gérald HESS, Maître d’enseignement et de recherche (Université de Lausanne) : Ce que l’environnement fait à l’éthique

14H – 16H – ATELIER COLLECTIF : S’APPROPRIER LES COURANTS DE L’ÉCOLOGIE

16H – 17H30 – DISCUSSION : ET DANS NOS CLASSES ?

VENDREDI 11 NOVEMBRE 2022

9H – Accueil des participants

9H30 - 11H – Conférence-débat : Emmanuel PONT, ingénieur, auteur du blog « Enquêtes écosophiques » :
Faut-il arrêter de faire des enfants pour sauver la planète ?

11H – 12H – DISCUSSION : ET DANS NOS CLASSES ?

13H30 – 16H30 – ATELIERS au choix

16H30 – 17H30 – Mise en commun et bilan des journées

ATELIERS animés par des professeur⋅e⋅s de philosophie

► Une fresque du climat pour consolider les connaissances

► Le Parlement des choses : s’approprier des controverses politico-scientifiques

► Organiser un Conseil de l’État d’Alaska en série technologique :
la nature doit-elle être protégée des êtres humains ?

Les journées d’étude de l’ACIREPh sont ouvertes à tous ceux que les questions de l’enseignement de la philosophie intéressent, et s’adressent tout particulièrement aux professeurs de philosophie, débutants ou expérimentés, qui souhaitent réfléchir collectivement à leur pratique, pour s’emparer des questions posées par leur métier.