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Atelier sur les dossiers d’élève en Terminale HLP

Animé par Raphaël Barbey, professeur à Nantes

lundi 3 juillet 2023, par Fanny Bernard

À partir d’une idée de ma collègue de lettre, nous faisons travailler les élèves de notre groupe de terminale HLP à la réalisation de deux dossiers personnels (un par trimestre) ; le premier à partir de la revue hebdomadaire Le 1 ; le second, sous la forme d’un manuel de la classe.

Enjeu
L’enjeu de faire travailler les élèves à la réalisation de dossiers est double. Il s’agit d’une part de les préparer, tout au long de l’année, à la perspective du grand oral (pour ne pas découvrir subitement son existence au troisième trimestre, et le travailler trop superficiellement ou exclusivement à ce moment de l’année, mais plutôt pour en répartir la préparation sur l’année) ; d’autre part, de permettre aux élèves d’approfondir personnellement les vastes thématiques du cours, en travaillant sur des thèmes, des exemples et selon des approches qui sont les leurs (un présupposé de cette démarche, assez coûteuse en temps – cf ci-dessous – est donc le suivant : étant donné le flou relatif des programmes de HLP, il me semble inutile, en tout cas en philosophie, de les noyer de centaines de références, d’éléments de contexte ou d’histoire des idées qu’on ne peut avoir le temps d’approfondir ; ma démarche, discutable à ce titre, est alors plutôt de travailler sur peu de références précises et approfondies en cours, et de laisser les élèves explorer plus librement certains aspects des thématiques du programme au travers de leur dossier).
Plus généralement, le but est aussi de faire travailler les élèves de façon plus suivie, sur un objectif de moyen terme ; et, en ce qui concerne la philosophie, de définir une modalité de travail « de spécialiste », dotée d’une véritable autonomie vis-à-vis du tronc commun.

Contexte
Pour rendre possible une transposition ou une appropriation de cette activité dans vos propres contextes d’enseignement, voici quelques éléments sur le lycée au sein duquel nous l’avons réalisée.
Il s’agit d’un lycée général et technologique, à Carquefou (banlieue de Nantes), avec un public d’élèves globalement CSP + ; des groupes de HLP de taille moyenne en terminale (une quinzaine d’élèves), qui comportent toujours quelques excellents élèves, impliqués et autonomes, et peu de très grandes difficultés scolaires (même si tous les élèves ne sont évidemment pas en réussite scolaire). Enfin, le CDI est vaste et accessible : on peut y faire travailler environ deux classes et demi ; pour un petit groupe d’élèves de HLP, c’est donc presque toujours possible d’y accéder.
Comme enseignants, ma collègue et moi travaillons relativement en binôme : nous nous concertons et construisons des évaluations, et quelques temps de travail ensemble, mais sans progression commune et en construisant nos cours de manière relativement indépendante par ailleurs. Le lycée a construit les horaires de HLP sur trois blocs de deux heures par semaines, que nous nous répartissons comme nous le souhaitons (généralement : une semaine à deux heures de philo et quatre heures de littérature, puis l’inverse, etc.)

Déroulement (premier trimestre)
Nous organisons en gros notre année en deux chapitres (sur la recherche de soi, puis sur l’humanité en question), un par trimestre avant les épreuves de spécialité en mars, à partir des en-têtes du programme (au troisième trimestre, nous faisons un chapitre complémentaire, autour de la notion de modernité). Pour les élèves, il s’agit donc de réaliser un dossier par trimestre.
1. Je me suis occupé de lancer ce travail sur dossier à partir de mes introductions de chapitre, en philosophie. Après un peu plus de trois heures d’introduction (sur deux cours, donc), j’ai distribué aux élèves le descriptif officiel de chaque entrée du programme (BO), en leur demandant de lire la partie correspondant au chapitre commencé, afin de : impérativement, choisir un ou deux thèmes qui les intéresse en lien avec les enjeux du programme ; si possible, formuler une question à partir de ce thème (à ce stade, ce peut être une question provisoire, retravaillée plus tard). Ce travail, commencé en classe pendant une quinzaine de minute, est à terminer pour la séance suivante, réalisée au CDI.
2. En général, nous essayons de coanimer (gratuitement…) cette séance, et si possible accompagnée de la professeure-documentaliste du lycée. Au cours de la première heure, il s’agit pour les élèves de découvrir la revue Le 1. Le CDI y est abonné, et dispose donc de nombreux exemplaires en réserve. Les élèves en choisissent deux (ordinairement des numéros « classiques », plutôt que les quelques numéros « doubles » ou « hors-série » existants), sans forcément de lien ni avec leur questionnement, ni même avec la spécialité HLP, mais simplement pour analyser la revue : son format (un peu atypique : dépliant), ses rubriques (et leurs variations éventuelles d’un numéro à l’autre), son contenu. La professeure-documentaliste peut intervenir pour présenter quelques enjeux en lien avec la presse écrite : le fonctionnement d’une rédaction, etc. Une fois que les élèves ont travaillé à partir du tableau (cf annexe ; nous le leur distribuons vide), nous mettons en commun leurs propositions.
Ensuite, en deuxième heure est consacrée au commencement de leur propre numéro. C’est l’objectif du premier trimestre : que chaque élève, individuellement, réalise son propre numéro complet sur le modèle de la revue, à partir de la question qu’il ou elle aura déterminé grâce au descriptif du programme. Pour le faire, tout ou partie de la revue peut-être rédigée individuellement, mais l’un des enjeux de l’exercice est aussi, évidemment, de faire faire des recherches aux élèves : aller trouver un extrait qui fera office de telle rubrique, construire une fausse interview à partir d’un véritable extrait d’œuvre, etc. Globalement, pour cette première séance, l’enjeu est d’abord de planifier leur travail, qui s’étale sur tout le premier trimestre (en gros un peu moins de deux mois, cf ci-dessous sur le calendrier) ; de repérer de quels textes, images, etc. auront-elles et ils besoin (selon les rubriques de la revue, et les contraintes ci-dessous).

Contraintes et évaluation
La consigne générale est de réaliser son propre numéro de la revue Le 1 ; mais nous ajoutons quelques contraintes supplémentaires. D’abord, la rubrique « zakouski » (l’édito) doit nécessairement être rédigée par l’élève. Ensuite, nous demandons une bibliographie précise des sources, en annexe. Parmi les références qui s’y trouvent, doit apparaître nécessairement au moins une référence « papier » issue du CDI (et pas seulement le fruit de leurs recherches numériques), ou bien un extrait de leur lecture personnelle du trimestre (au choix délimité par une liste que nous leur distribuons par ailleurs). Bien entendu, ils peuvent rédiger par eux-mêmes une partie du dossier quelle qu’elle soit (certaines rubriques sont plus littéraires, d’autres plus philosophiques…). Enfin, une analyse iconographique est demandée (en lien avec la rubrique « le poster »).
À l’issue de leur travail, les élèves devront rendre leur dossier (en général, ils impriment tout grâce à l’imprimante du CDI et ont un petit temps de scotchage pour mimer le format de la revue, à partir de feuilles A4 et A3), mais aussi leur bibliographie. La séance finale de ce travail a lieu en classe, en deux heures : pendant la première, les élèves se présentent leurs dossiers respectifs par groupes de 3-4 pendant cinq minutes chacun ; pendant la deuxième, ils rédigent un essai à partir de leur question (ils n’ont qu’une heure, mais nous adaptons l’évaluation à cette durée ; de plus, ils ont longuement travaillé sur leur dossier auparavant, et ils les gardent et les utilisent pendant cette heure de composition).
Finalement, nous notons le dossier sur 20 et l’essai final sur 10. L’oral n’est pas noté, mais nous pouvons l’évaluer sommairement en passant parmi les groupes pendant la première heure. Beaucoup d’élèves soignent particulièrement la mise en page (notamment au moyen de logiciels comme Canvas), ce que nous prenons en compte dans la notation.
Se trouvent évaluées dans ce travail : des capacités de questionnement, d’analyse, de rédaction ; des compétences de recherche et d’organisation ; un savoir-faire logiciel (mise en page), sur lequel nous n’insistons pas vraiment (nos élèves savent déjà le faire).

Calendrier
La première séance au CDI se déroule en gros à la mi-septembre ; le dossier du premier trimestre est à rendre pour la rentrée de la Toussaint. Au premier trimestre, c’est une charge de travail assez lourde. Il est donc impératif de suivre régulièrement les élèves pour éviter que certains ne prennent trop de retard et se retrouvent submergés.
Entre la mi-septembre et la Toussaint, nous allons au CDI environ une fois par semaine pendant deux heures (alternativement ma collègue et moi), au maximum – parfois moins. Ce travail implique donc nécessairement une bonne part de travail personnel des élèves, hors du seul temps de la classe.

Bilan
Au deuxième trimestre, du fait des épreuves de mars, nous demandons aux élèves de réaliser un second dossier, plus allégé : un chapitre de manuel de HLP, à partir d’une question déterminée de la même manière (cf poly en annexe).

Quelques difficultés et retours (les nôtres et des élèves) :
→ Au premier trimestre surtout, il s’agit d’un travail lourd et exigeant, qui implique de bien s’organiser d’emblée pour ne pas accumuler du retard
→ Les élèves apprécient de travailler en autonomie, à partir de leur propre question, et perçoivent assez concrètement les liens avec le cours, même si nous avons remarqué qu’ils s’appuient bien trop peu sur leurs dossiers lors d’autres travaux (par exemple de méthodologie des épreuves du bac) : le dossier semble apparaître aux élèves comme très compartimenté, et nous ne savons pas encore si et comment nous pourrions rendre plus explicites les liens entre ce travail autonome et le travail collectif plus usuel de la classe.
→ Il leur est difficile d’accéder à certaines ressources (textes de philosophie, poèmes…), ce pour quoi ils ont besoin d’être guidés et orientés régulièrement au fil de leur travail (car nous connaissons mieux qu’eux tel recueil de poème, tel site Internet où chercher des extraits, tel passage d’œuvre qui résonne avec leur questionnement…).
→ Les questions travaillées ne sont finalement pas toujours retenues pour le grand oral : soit parce que la formulation est affinée et précisée (les attendus du dossier ou de l’épreuve de GO ne sont pas strictement les mêmes), même si le thème reste globalement identique ; soit parce que certains élèves choisissent de travailler à partir d’un autre thème et de repartir de zéro (nous le déconseillons, mais sans l’interdire).
→ Certains élèves ne font pas du tout le travail de mise en page nécessaire (souvent, ce sont des garçons).